Faut-il que nos enfants, et en particulier nos adolescents, connaissent les halakhot de pureté familiale ?
D’une part, pourquoi pas ? Nous parlons à nos enfants des halakhot de chabbat, de cacheroute, des berakhot. Nous leurs enseignons les détails à la maison ou ils les apprennent à l’école. Pourquoi donc devrions-nous passer sous silence ce qui est la base du foyer juif ?
Certains diront que justement, comme ceci est la base du foyer juif, il est inutile d’en parler avant que nos enfants arrivent à ce stade-là. “Inutile de parler de ces choses qui relèvent de la tsniout”, “Je ne veux pas que mes enfants devinent si je suis niddah ou pas”, “Si mes enfants savent que je vais au mivkeh ils sauront quand est-ce que nous avons des rapports intimes et je ne veux pas de cela” ou tout simplement “En parler veut dire ouvrir le sujet de la sexualité et je ne suis pas à l’aise avec”.
D’un autre côté, il est difficile d’ignorer ce sujet. Pour peu que notre ado suive la lecture de la Torah ou apprenne certains textes de la michna ou du talmud, le sujet de niddah va monter à la surface. Et si vous avez la chance d’habiter en Israël ou d’y aller en vacances (Covid permettant…), il est plus que courant de se trouver face à un ancien mikveh dans un des nombreux sites touristiques. Ceci est vrai en Europe aussi d’ailleurs, même s’il faut un peu plus les chercher.
Et si votre enfant ou ado ne vit pas dans une bulle, il voit, entend et lit bien des choses sur la sexualité. Lui donner le message que la Torah est consciente de ce sujet et ne l’ignore pas permet de recentrer son importance dans notre vie de juifs.
Je pense que le fait que j’allais devoir amorcer le sujet est arrivé le jour où un de mes enfants m’a accompagné tremper des nouvelles assiettes au mikveh-vaisselle. Du haut de ses presque six ans il a lu le panonceau du bâtiment contre lequel nous nous trouvions et m’a demandé “Dit maman, c’est quoi un mikveh-femmes ?”
Que nous le voulions ou non, il est préférable que, comme beaucoup de sujets liés à l’intimité, nous en parlions à nos enfants avant qu’ils ne découvrent la “vérité” seuls ou à l’aide de leurs amis ou des médias.
Tout comme ces sujets, celui de la pureté familiale peut nous mettre mal à l’aise parce que nous nous projetons dedans et ne voulons pas que nos enfants nous imaginent dans des situations intimes. Et c’est normal que nous ayons cette réaction.
Que pouvons-nous faire ?
Tout d’abord commencer tôt, de manière naturelle et selon le niveau de l’enfant. On peut facilement dire que beaucoup de mamans vont au mikveh tous les mois, et que c’est une façon que la Torah leur a donné pour se ressourcer. On peut expliquer que la Torah régule de nombreux aspects de notre vie, comme le chabbat et la cacherout, mais aussi certains aspects de la relation entre un homme et sa femme.
Lorsque l’enfant grandira et que l’on parlera de puberté et des règles, il sera possible de dire qu’elles jouent un rôle dans la dynamique d’un couple, en plus de la signification qu’elles ont sur notre fertilité. Dans aucun cas il ne sera nécessaire de rentrer dans tous les détails, sauf s’il y a des questions directes auxquelles nous répondront de manière claire, mais pas personnelle. Il est tout à fait possible, par exemple, de répondre que oui nous aussi allons au mikveh, mais que la date exacte fait partie des choses privées entre les parents.
Comme pour toutes les discussions autour de la sexualité, il est aussi important d’utiliser une terminologie neutre : “un homme et une femme marié” et non “papa et maman”, ce qui permet de nous dissocier des descriptions, et de se rappeler qu’un enfant ne va pas essayer d’imaginer ses parents ayant des rapports intimes.
Dans les cas (plutôt rares) où une question sur notre vie intime sera posée, il est toujours permis de répondre de manière générale puis de fermer le sujet en disant “ceci est privé et je n’irais pas plus loin”.
Une condition pour que ce dialogue se fasse le plus sainement possible est de prendre le temps de renouer, nous-mêmes, avec ces halakhot. Si nous vivons la période de niddah comme une période difficile, il sera compliqué de dire que ces halakhot sont une source de joie. En revanche, si pour nous ceci est l’occasion de se rapprocher sans avoir besoin du tactile, et que nos enfants voient l’amour que nous portons l’un pour l’autre quelque soit le moment du mois, il sera beaucoup plus simple de transmettre la beauté de nos mitsvot.
Selon l’âge et la maturité de notre ado nous pourront ajouter des détails. Tous ne sont pas clairement pas nécessaires, mais le sujet en lui-même ne peut être ignoré.
Bonne chance !